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Balade féministe à Paris

Compte rendu

Temps : neigeux, 4°c

Paris, le 7 février 2021

Cher François,

J’ai osé, je l’ai proposée. Il faisait un froid de canard ce dimanche 7 février mais tous nous étions au rendez-vous place de l’ile de la Réunion (à côté de La Nation), au pied d’une de ces deux colonnes du trône, estampillée de la plaque « monument historique ». Je ne l’avais pas calculé celle-ci mais elle devait annoncer le thème de la balade à travers Paris : allons voir si des plaques existent pour ces femmes d’exception qui vécurent ici à Paris, toutes plus ou moins connues, toutes ayant mérité à coup sûr de figurer dans un film si j’en juge par la richesse de leurs vies. Tu avoueras que tu en aurais croqué plus de 8, cette fois-ci ! Laisse-moi te les présenter :
D’abord, la première, la mère en quelque sorte d’ailleurs, la seule faisant l’objet d’une grandiose plaque au 151, rue de la Roquette : Hubertine Auclert féministe de la première heure au 19ème siècle qui batailla pour la féminisation des titres, fonda la revue la Citoyenne pour faire valoir ses arguments et débattre sur la condition féminine, déclarant « femmes de France, nous avons des droits à revendiquer (...), Unissons-nous, associons-nous ». De là, nous partîmes vers la rue St Georges, à 2 pas de la Place éponyme où se font face deux hôtels remarquables (celui d’Adolphe Thiers, drôle de citoyen et celui de la Païva, drôle de citoyenne) mais nous nous étions rendus dans ce quartier d’une sulfureuse réputation pour saluer le talent de Marie Bashkirtseff, peintre, morte à 25 ans de la tuberculose et qui, malgré sa courte vie eu le temps d’allumer Maupassant et se passionner de tout en devenant rédactrice féministe à la revue de Mme Auclert. Puis, nous redescendîmes vers le boulevard Haussmann pour nous rendre précisément au 124 rue de Provence où devant un immeuble splendide nous rendîmes hommage à Marthe Hanau, dite la Banquière, magnifiquement interprétée par Romy Schneider dans le film de Francis Girod. Celle-ci fonda la gazette du franc, œuvra dans les milieux de la finance pour accompagner les petits investisseurs sur le marché boursier, c’était juste avant la crise de 1929, elle fut arrêtée à la suite d’un montage iconoclaste. Juive, elle fut calomniée par les milieux conservateurs et d’extrême-droite, elle se suicida en prison en laissant ce mot « J’ai la nausée de cet argent qui m’écrasa ». Nous repartîmes vers l’église de St Augustin puis longeâmes le parc Monceau pour arriver au domicile, 1 rue Alfred de Vigny, de celle que tu connais le mieux, Danielle Darrieux puisqu’elle te fit tourner en bourrique dans 8 femmes et qu’elle ressemble tant à ta grand-mère ! Inutile de te la présenter, sa filmographie est si impressionnante qu’on se demande encore laquelle lui arrivera à la cheville, peut-être Catherine Deneuve dont elle commenta la prodigieuse carrière en déclarant « C’est la seule femme qui m’empêche d’avoir peur de vieillir ». De là, nous reprîmes notre route en tournant autour de l’Arc de Triomphe -car nous le valons bien- et nous diriger sur la contre-allée de l’Avenue Foch, au 23 précisément pour faire une méga-pause (thé, von chaud, parmesan, crêpes fourrées) devant l’immeuble cossu de notre muse à toutes, Renée Vivien, surnommée Sapho1900, cent pour cent, tant ses relations tumultueuses exclusivement féminines lui valurent de pondre des poèmes aussi raffinés que ceux de Baudelaire ou Verlaine glorifiant les amours lesbiens...je te laisse en savourer un passage
« L’hyacinthe saignait sur les rouges collines,
Tu rêvais et l’Éros marchait à ton côté...
Je suis femme, je n’ai point droit à la beauté.
On m’avait condamné aux laideurs masculines » (Paroles à l’Amie 1906)
Frigorifiées mais pas encore congelées, nous repartîmes vers le pont de l’Alma pour faire plusieurs arrêts rapprochés : d’abord au 102 rue St Dominique, pour saluer le travail d’avocate exemplaire de Gisèle Halimi qui défendit en particulier, ce couple de lesbiennes belges, sauvagement violées dans le sud de la France en 1974 et contribua activement à la criminalisation du viol, en déclarant en autres « une femme violée, c’est une femme cassée, éclatée qui, à mon sens, ne s’en remettra jamais ». Puis nous fîmes un arrêt devant le siège du Ministère de la Santé au 14 avenue Duquesne puisque Germaine Poinso-Chapuis fut la première femme ministre de plein exercice dans l’histoire de la République de 1947 à1948 jusqu’à Simone Veil en 1974. De là nous étions à deux roues du 44 rue Vaneau où vécut Benoîte Groult, féministe en toutes lettres qui dénonça publiquement en 1975 dans Ainsi soit-elle les mutilations génitales infligées aux femmes. Il était temps de regagner le 14ème arrondissement pour nous diriger vers le 57 rue du Montparnasse, où résida Françoise d’Eaubonne, éco-féministe, avant-gardiste qui lança le FHAR avec l’écrivain Guy Hocquenghem revendiquant le droit à l’homosexualité pour les deux sexes. Elle créa en 1978 l’association Écologie-Féminisme et déclara « Deux fléaux menacent l’humanité tout entière : la surpopulation et la destruction des ressources ». Tu avoueras qu’en 2021, en pleine crise sanitaire impactant le monde entier, on peut estimer qu’elle avait gravement raison. De là, nous nous rendîmes au 11bis rue Victor Schœlcher, l’un des domiciles parisiens de Simone de Beauvoir dite Le Castor, immense intellectuelle aux écrits puissants mais aussi femme d’action qui cofonda avec Gisèle Halimi Le Manifeste des 343 pour s’opposer à l’interdiction de l’avortement. Elle écrira entre autres : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse (ou sanitaire pourrait-on rajouter !) pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. » Et pour clore notre balade alors que nos extrémités commençaient sérieusement à geler, nous finîmes la balade au 7/12 rue de l’Odéon pour un ultime hommage au couple de lesbiennes Sylvia Beach et Adrienne Monnier qui furent libraires associées, amantes et résistantes pour faire briller la culture littéraire dans le Paris des années folles. A titre d’exemple de leur fructueuse collaboration, tu noteras que la première publia Ulysse de James Joyce en 1922 quand la seconde le traduisit 7 ans plus tard. Elles furent récemment mises en lumière par le Conseil de Paris en novembre dernier. Je te laisse en savoir plus :
<a href="https://www.paris.fr/pages/hommage-a-adrienne-monnier-sainte-patronne-des-libraires-15956">https://www.paris.fr/pages/hommage-a-adrienne-monnier-sainte-patronne-d…</a>
Voilà, nous nous sommes bien promené.e.s, à vélo, tout est plus beau même quand il ne fait pas beau. L’important c’est d’être bien entouré.e.s, et je t’assure que ce jour-là j’avais la crème « Gentilly» : Franck, notre président féministe avait fait le déplacement et même une mascotte surnommée « Cookie », si blottie dans les bras de Flo qu’il ne risquait pas de tracer un sanglier ! Il me glissa juste à l’oreille « je suis de la race des Spitz allemand, à ne pas confondre avec le Spritz l’apéro italien même si j’ai la même couleur;-) »
A très bientôt pour de nouvelles aventures
Dérailleusement votre,

Infos pratiques

Nombre de participants :
6 personne(s)
Distance parcourue :
23 Km
Dénivelé positif :
0 m

Ressources liées

Activité Balade intra muros Paris COMPLET

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